CHRIS DUARTE
Blue Velocity (CD 2007)



Titres:
1 - Amy Lee
2 - Do It Again
3 - Hard Mind
4 - Something Wicked
5 - I'll Never Know
6 - Sun Prairie Blues
7 - Never Gonna Change
8 - R U 4 Real?
9 - Out In The Rain
10 - Leave Her Be
11 - Met My Match

Personnal:
Chris Duarte (guitars, vocals)
Dustin Sargent (bass guitar)
Damien Lewis (drums)

Cet album est trompeur: il commence de manière très classique, avec de bons titres, biens joués, avec un son de guitare incisif, des soli bien "rentre dedans", une voix expressive et bien posée. On a bien quelques variantes autour de l'éternel blues, avec ici des accents plus "funky", et des cocottes savantes, ou là un côté boogie influencé par l'éternel SRV, avec un son typiquement stratoïde. On apprécie, en notant la qualité de l'interprétation, mais on se dit en même temps qu'on a déjà entendu ce genre de choses, même si là on a clairement droit au haut de gamme du genre. En fait, l'impression est trompeuse: on vient juste de préparer gentiment votre esprit à ce qui va suivre.

Tout se met à déraper au quatrième titre: après une intro solitaire encore très "vaughanienne", nous voilà embarqués dans un long blues déchiré de treize minutes, du genre à faire dresser le poil sur la peau des avant-bras. A partir de là, c'est fini: on a basculé dans l'univers de M. Duarte. Et comme une tuerie peut en cacher une autre, le titre suivant nous achève, dans le genre "la deuxième compo recoupe le poil" (dressé!), et là, plus question de blues lent: on a droit au contraire à une furia brûlante qui fait encore grimper le thermomètre. La rythmique pulse comme une malade et les premiers choeurs viennent appuyer la voix principale.

Avant de nous faire sombrer dans la folie, le groupe nous assène un titre gorgé de sensualité, sur un tempo moins rapide, histoire de nous prendre à contre-pied: l'emprise se resserre encore, mais on arrive à reprendre sa respiration, et on se dit qu'on a une chance de s'en sortir. Que nenni: celui qui a programmé la succession des titres sur cet album est un redoutable vicieux. Il nous entraîne aussi sec dans le chaudron d'un implacable boogie, hargneux, teigneux même, une vraie locomotive de scène quelque part entre le ZZ Top des 70's et les meilleurs titres d'AC-DC. Et là vous dites "OK, compris, je capitule: ce gars-là à quelque chose de plus!"

La récompense arrive aussitôt sous la forme d'une longue ballade de près de neuf minutes, à nouveau précédée d'une longue intro. Et là, c'est le fantôme d'Hendrix qui rôde, hantant une guitare au son surchargé d'effets aux limites du chaos. La bouche ouverte, vous vous contentez de subir, envahi par le plaisir qui entre par les conduits auditifs. Conquis, vous laissez le reste de l'album se dérouler dans un brouillard d'où est absent la raison, mais où planent des ondes envoyées en direct par Johnny Winter, avec des titres qui devraient cartonner sur scène: un nouveau boogie furieux, suivi d'un blues/shuffle métronomique et monstrueux de précision et de puissance, d'une facture ultra-classique avec ses douze mesures à la structure bien connue, mais qui avance inexorablement, propulsé par une rythmique puissance quatre (le carré du carré!) sur plus de six minutes (!). Pour achever un auditeur, qui n'en demandait pas tant mais a demandé grâce depuis longtemps, Chris Duarte et son groupe nous délivrent un bref mais violent électrochoc au gros son qui devrait ravir les fans d'heavy metal. Blitzkrieg! Comme on l'a dit autrefois dans un film culte: "C'est du brutal!"

Le nouveau Chris Duarte est une redoutable tuerie. On n'a plus qu'une hâte après ça: voir ce que ça donne sur scène, histoire de se faire injecter encore un petit shoot de plus. C'est dire… Vous pouvez acheter ce disque, mais tant pis pour vous, ne venez pas vous plaindre après: le risque est énorme de devenir accro. A vous de voir, mais je vous aurais prévenu…

Yves Philippot